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Hannah Dallosz, l’inspiration comme une respiration
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Cette nuit je ne dors pas.
Je ne dors pas, et je pense à toi.
À ce bleu, à notre rencontre cet après midi d’automne dans la cathédrale de Reims.
À cet après midi où je suis saisie par la lumière bleue qui passe à travers le vitrail. Un bleu si doux, si tendre.
Cette lumière m’enveloppe, me réconforte, me berce. Cette lumière est habitée. Une lumière que jamais je ne voudrais laisser, ce bleu dans lequel j’ai envie de me confondre.
Je lève les yeux, je reconnais, je reconnais ton trait, ta signature, non pas ton nom mais la douceur qui émane de ton œuvre.
Le bleu, le trait qui paraît presque naïf tant il est maîtrisé, tant il est inspiré.
Cette douceur bleue comme le firmament, comme le ciel de l’enfance, comme…Le bleu Chagall.
Lorsque je sors de cette rencontre au cœur de la cathédrale, j’ai envie de te retrouver. Là, sur le parvis, je te cherche dans mon téléphone pour visiter plus ton œuvre. Tu es venu me cueillir là dans ce lieu sacré, j’ai envie de plus te connaître. La magie d’internet, me donne accès grâce à mon téléphone à moult informations… Que de frustrations liées à cette connaissance immédiate, foisonnante et superficielle sur ce petit écran où tout s’affiche mais plus rien n’est habité. Alors je décide, là sur le parvis de la Cathédrale d’aller à ta rencontre, je veux revivre le bleu.
J’ai hâte de te connaître, de tenter de saisir ce qui anime l’artiste mystique que tu es. Mais qui es tu, je vois ton regard bleu parfois ici, parfois ailleurs…
A la maison je m’entoure des reproductions de tes peintures, je lis ton livre, celui de ton fils aussi.
A l’heure où j’écris , je n’ai pas encore pu descendre à Nice contempler le musé qui t’es consacré.
Par contre, je suis retournée à Reims.
Rien n’est plus saisissant que tes vitraux, comme si la lumière qui passait au travers sublimait l’œuvre.
Tu as passé ta vie à bourlinguer de la Biélorussie, ta terre natale, à Paris, aux USA, au sud de la France… Tu n’appartiens à personne et rien ne te retient sauf peut être l’amour de la beauté que tu cherches indéniablement à reproduire avec ton ressenti.
Tu peins, tu peins, tu écris… Tu dis dans ton autobiographie que tu n’aimes pas parler, tu ne trouves pas les mots alors tu peins.
Tu dis que la peinture est ta prière.
Quand je vois la douceur et le chatoiement des couleurs qui émanent des tes peintures, alors je me dis que Dieu est réellement plein de tendresse.
L’amour… Tu as su honorer toute la création...
La nature, les animaux, les artistes, le mouvement, l’harmonie….
Bien sur les scènes bibliques habitent ton œuvre comme une quête constante, une errance qui cherche. Il y a toujours quelque part un rabbin, un homme qui porte le livre de la loi sur beaucoup de tes toiles. Comme si l’ancien testament doit toujours éclairer le nouveau.
Tu peins les scènes traditionnelles avec une traduction qui est tienne.
De ce parcours de vie, Chagall, je t’aime.
J’aime ton identité judéo-chrétienne qui ressort constamment dans l’œuvre.
Tu ne mets pas de frontières entre le judaïsme et le christianisme, et cette unité que tu peins et que tu vis, me réjouit.
Tu peins Jésus sur la croix avec un Talith juif qui ceint sa taille. Quelle audace ! Mais quelle vérité.
Tu te déchaînes dans les couleurs pour tes fresques sur les animaux, la création, la beauté du monde , tu transmets une atmosphère si joyeuse.
Ton œil amoureux sait perpétuer par la peinture tout l’émerveillement et le respect de ce que tu ressens.
Alors bien sûr, je me suis attardée sur cet aspect mystique de ton œuvre, mais il suffit de rentrer à l’opéra Garnier à Paris, pour être envoûté par le mouvement , les couleurs et la joie du plafond que tu as signé… Ce n’est pas seulement une maîtrise de l’expression picturale, mais bien le supplément d’âme de celui qui se laisse inspirer pour tout donner. Je ressens une liberté d’expression totale sans limites.
Je demeure une grande amoureuse de tes vitraux, et j’invite le lecteur à se laisser prendre par ce bleu Chagall.
Des vitraux tu en as semé dans bien des lieux : Cathédrale de Reims, Cathédrale de Metz, Chapelle de Saillant, Nations Unies à New York, Synagogue de l’hôpital de Hadassah à Jérusalem, l’église de Tudeley en Angleterre… et bien d’autres que je n’ai pas encore exploré.
A Paris, l’atelier des lumières t'a consacré une exposition lumineuse.
« Pour moi, un vitrail représente la cloison transparente entre mon cœur et le cœur du monde.
Le vitrail est exaltant, il lui faut de la gravité, de la passion.
Il doit vivre à travers la lumière perçue.
La lecture de la Bible est déjà la lumière,
Et le vitrail doit manifester l’évidence par sa grâce et sa simplicité »Marc Chagall.
Bibliographie :
Marc Chagall « Ma vie »
David McNeil « quelques pas dans les pas d’un ange »
Article paru dans Reflets n°47